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Exposition au Musée d'Art Aborigène d'Utrecht : Mapping Australia - Country to Cartography

Visite du Roi Willem-Alexander et de la Reine Maxima des Pays-Bas à l'occasion du vernissage de l'exposition "Mapping Australia" à l'AAMU. A droite : Georges Petitjean, conservateur de l'AAMU. Derrière le Roi et la Reine, une œuvre collaborative mas…

Visite du Roi Willem-Alexander et de la Reine Maxima des Pays-Bas à l'occasion du vernissage de l'exposition "Mapping Australia" à l'AAMU. A droite : Georges Petitjean, conservateur de l'AAMU. Derrière le Roi et la Reine, une œuvre collaborative masculine du Spinifex Art Project, prêtée par notre galerie Aboriginal Signature • Estrangin pour l'exposition.
© Photo : Marnix Schmidt, with the courtesy of AAMU.

Le 3 octobre dernier, nous étions au vernissage de l'exposition "Mapping Australia" au Musée d'art Aborigène contemporain d'Utrecht, inauguré par le Roi Willem-Alexander et de la Reine Maxima des Pays-Bas.

Il s'agit d'une exposition historique sur l'Australie et également l'art Aborigène, célébrant l'arrivée des hollandais il y a 400 ans sur les côtes Australiennes dans le cadre des explorations de la VOC.

Les premières cartes réalisées par des Européens il y a 400 ans sont exposées au Musée d'Utrecht et dialoguent avec des œuvres d'art Aborigènes magistrales d'artistes contemporains, célébrant le territoire et les pistes chantées accomplies par ce peuple depuis des millénaires.

Une mention spéciale pour les œuvres de Judy Watson en vidéo, sur toile ou sur papier. Elles évoquent à la fois les évènements tragiques de la colonisation, mais également des crises environnementales récentes, à travers des cartes sublimées et incarnées par ces évènements.

Des montages photographiques de l'artiste Michael Cook questionnent notre vision du monde et ce choc des civilisations entre l'arrivée des occidentaux en Australie et la rencontre avec le peuple Aborigène.

De superbes nacres gravées de 1900 soulignent quant à elles toute l'ancestrale modernité de ce mouvement artistique et autant de témoignages cartographiques sur de multiples supports.

L'assiette en étain de 1616, commémorative du passage de DIrk Hartog il y a 400 ans était présente lors du vernissage, prêtée par une institution.

Les nombreuses cartes imprimées ou originales, juste ébauchées par les hollandais lors des premières découvertes des côtes australiennes sont émouvantes et mystérieuses.

Notre galerie Aboriginal Signature a également participé à cette exposition, en prêtant au musée une œuvre magistrale de 3m sur 2 des artistes Aborigènes hommes du Spinifex Art Project. Il s'agit d'une carte ancestrale de leur territoire, qui leur permis à travers une œuvre comparable de récupérer leur territoire traditionnel en 1991.

Cette exposition passionnante, montée par le conservateur Georges Petitjean, et toute l'équipe du Musée, mérite le détour dans cette charmante ville d'Utrecht.
A ne pas manquer à jusqu'au 15 janvier 2017.

A noter : au deuxième étage figure l'exposition permanente de la collection de l'AAMU, qu'il ne faut pas oublier de visiter également.

Plus d'info sur l'exposition à l'AAMU.
Info sur les horaires d'ouverture du musée.

Intemporelle modernité - Art Aborigène d'Australie - Papunya Tula

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Il y a deux ans, j’arpentais les allées des collections du South Australian Museum à Adelaïde. Jamais je n’avais autant perçu la richesse et la diversité des objets Aborigènes.
 
Des paniers finement tressés du XIXe siècle y ressemblent à des bicornes napoléoniens.
Des casiers en fibre végétale battent en brèche l’idée d’un pur nomadisme. Ils servaient à piéger les poissons dans les rivières mais également dans des enclos dédiés à la pisciculture sur les côtes Australiennes...

Un peu plus loin, un boomerang tout érodé et blanchi, flirte avec les millénaires. Daté au carbone 14, il nous regarde du haut de ses 11 000 ans.

A un autre étage du musée, un polymère naturel inventé par les Aborigènes chamboule la pendule du temps. Le chauffage des buissons de Spinifex permit très tôt d’obtenir une colle, presque comme une matière plastifiée permettant d’assembler, d’entourer, d’emmancher des objets.


Vibration de signes millénaires

D’une vitrine à l’autre, je m’étonnais face aux symboles peints ou scarifiés sur les objets des siècles passés. Avec une surprenante modernité, des zig-zags complexes ornaient des boucliers en bois. Un peu plus loin des nacres gravées offraient des entrelacs, courbes et déliés, aux effets vibratoires et cinétiques renforcés par le miroitement de la matière.
 
Des panneaux en bois gravés anciens, appelés - messages boards -, ouvraient une autre fenêtre sur un langage ancestral. Au détour des signes, apparaissaient les lignes gravées des chemins du Temps du Rêve, les trous d’eau relevés par des cercles concentriques, les formes en U comme autant de personnages incarnés, les traces d’oiseaux ou d’animaux laissées par les grands ancêtres…
 
Ce vocabulaire pictural n’a jamais été oublié. Il retrouvera même une expression singulière quelques siècles plus tard dans la peinture Aborigène. Elle se révèlera à l’occident en 1971 en plein cœur du désert à Papunya.
 

Emouvante modernité

 
Aujourd’hui, avec la même fertilité qu’au départ, les Aborigènes convoquent au présent sur les toiles, la plus ancienne tradition artistique continue au monde.
Les retrouver aujourd’hui à Bruxelles, dans le cadre de notre nouvelle exposition « Aux sources de l’art » (*) avec les artistes de Papunya Tula est un moment privilégié et assez unique en Europe.
 
Les artistes actuels, sont les descendants des concepteurs de ces objets anciens. Ils sont même les gardiens de ces symboles et les partagent à travers leurs peintures. Ils jouent avec les motifs, les extrapolent, pour restituer toute la densité et la spiritualité de leurs mythes ancestraux.
Chaque peintre dispose de droits claniques hérités des anciens. Il peut ainsi transposer ces motifs peints hier sur leurs corps ou sur le sol, en utilisant de nouveaux supports comme les toiles de lin, et continuer ainsi de transmettre à son tour la mémoire de leur peuple.
 
Je me souviens d’une artiste Aborigène que je voyais chanter en peignant, puis danser une fois la toile terminée. Elle honorait les lieux et les ancêtres évoqués dans sa peinture.
En observant les formes presque sinusoïdales de son œuvre, il y avait comme une invitation à voir au-delà de la toile, à y lire comme une partition. Les ondulations de son pinceau, les effets de profondeurs, les scintillements cinétiques, portaient en eux un sens caché, une vision propre aux initiés, amplifiée et bercée par un univers musical millénaire. Chapeau bas !

Dialogue à travers les siècles et plus de 2500 km

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A gauche nacre gravée Aborigène, autour de 1920. A droite, peinture Aborigène de l'artiste Ronnie Tjampitjinpa (107 x 91 cm) de Papunya Tula Artists.

Rencontre du troisième type. 2500 km séparent ces deux objets et au moins cinq territoires de peuples aborigènes différents. A l'époque nomade c'était une énorme distance à travers le désert.

Les nacres, vierges, quittaient la côte près de Broome dans le Kimberley pour être échangées de clans en clans à travers les pistes chantées du désert. Non gravées au départ, elles le devenaient par la suite dans le cœur de l'Australie.

100 ans séparent cette nacre et cette peinture de l'artiste Aborigène Ronnie Tjampitjinpa. Et pourtant elles n'ont jamais été aussi proches. Les formes cinétiques dialoguent de l'une à l'autre. On ressent une proximité graphique forte. Elles furent toutes les deux réalisées par des représentants du peuple Aborigène Pintupi, tous descendants de la plus ancienne tradition artistique continue.

Quelle formidable ancestrale modernité dans ce chemin d'expression.

Cette œuvre fait partie de l'exposition "Aux origines de l'art" organisée au sein de la Galerie à Bruxelles jusqu'au 3 décembre 2016.

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